AccueilVeille médiasL’obsession anti-israélienne du journal Le Monde

L’obsession anti-israélienne du journal Le Monde

« No Jews, no news » dit l’adage. Depuis le début de l’offensive tous azimuts déclenchée par le mouvement islamiste Hamas contre Israël, les médias français lui consacrent une place importante. Le quotidien Le Monde, en particulier, se distingue par la couverture très partiale qu’il donne de ce nouveau round d’affrontements et par l’escalade de son parti pris anti-israélien, qui ressort de ses récents articles et éditoriaux.

 

Dès le 11 mai, Le Monde titre en « Une » : « A Jérusalem, flambée de violence sur fond de vide politique ».

 

 

Le lendemain, il reprend la même expression (que nous allons expliciter) en titrant sur cinq colonnes à la « Une » : « De Jérusalem à Gaza, l’escalade meurtrière », avec un éditorial intitulé « Le vertige du vide politique ».

 

 

Le titre en « Une » du lendemain est « Le retour du conflit israélo-palestinien », accompagné d’une photographie d’immeubles détruits à Gaza.

 

 

Enfin, le titre du 15 mai est « Israël-Palestine, Le spectre de la guerre civile et d’un conflit terrestre à Gaza ».

 

 

Aucun de ces titres ne désigne l’agresseur, c’est-à-dire le Hamas, Le Monde employant des expressions « neutres » comme « flambée de violences » ou « escalade meurtrière » qui semblent renvoyer dos-à-dos les deux parties. Mais cette « neutralité » apparente – qui est en soi mensongère puisqu’Israël est la partie attaquée et qui se défend, dissimule à peine un parti pris anti-israélien, qui apparaît très clairement en lisant le contenu des articles et des éditoriaux. Ce parti pris est particulièrement visible dans l’éditorial du 12 mai, « Le vertige du vide politique ». Ce « vide politique », là encore, semble renvoyer à la fois à la situation à Gaza et en Israël. Mais cette fausse symétrie et cette apparente « neutralité » (qui rappelle la définition de l’objectivité journalistique attribuée à Jean-Luc Godard : « L’objectivité à la télévision, c’est 5 minutes pour Hitler, 5 minutes pour les Juifs ») sont démenties dans le corps de l’éditorial, qui désigne clairement le véritable responsable de l’embrasement militaire : Israël. 

« La crise qui s’ouvre depuis lundi n’était cependant pas inéluctable », écrit ainsi Le Monde. « Elle est pour partie le fruit d’un inquiétant vide du pouvoir en Israël, où le gouvernement n’a pas su prendre la mesure des opérations policières qu’il multiplie à Jérusalem depuis un mois, et de l’assurance croissante de ses alliés d’extrême droite dans la rue ». Cette thématique va être reprise ad nauseam dans les jours qui suivent, Le Monde enfonçant à grands coups de marteau journalistique cette « thèse », qui voudrait que le gouvernement israélien soit en fait le véritable responsable de l’embrasement tant à Gaza qu’à Jérusalem et ailleurs dans le pays. Nous allons analyser plus en détail comment s’articule cette thèse scandaleuse dans l’éditorial du 15 mai.

 

Inversion des responsabilités et accusation d’Israël

L’éditorial du Monde, publié le 15 mai, jour anniversaire de la « Nakba », donne la mesure d’un phénomène déjà ancien, celui de l’inversion des responsabilités et de l’imputation à Israël des crimes de ses ennemis (1). Quand le Hamas déclenche, le jour anniversaire de la réunification de Jérusalem en 1967, une offensive militaire de grande envergure contre l’État juif, bombardé de missiles et de roquettes meurtrières visant exclusivement des civils, on pourrait s’attendre à ce que les grands médias français gardent un minimum d’équilibre. Qu’ils condamnent le mouvement islamiste, tout en appelant à un rapide « cessez-le-feu » pour réduire le nombre des victimes des deux côtés…

L’éditorial du Monde reconnaît d’ailleurs cette réalité, au détour d’une phrase, affirmant que « les roquettes du Hamas, tirées de façon indiscriminée et cynique sur les villes israéliennes, constituent un motif légitime de réaction militaire ». Mais il ajoute aussitôt, réduisant à néant cette minime concession à la réalité, que « Le problème commence quand un État ne conçoit qu’une grille de lecture sécuritaire ». Évidemment, quand le territoire d’un État est bombardé par des missiles tuant femmes et enfants, il ne faut pas se contenter d’une grille de lecture sécuritaire… Qu’est-ce à dire ? La suite nous donne la clé : ce sont les émeutes à l’intérieur des villes israéliennes. Or celles-ci ne sont pas, nous dit Le Monde, la conséquence d’une incitation de la part du Hamas et de ses relais à l’intérieur de la société arabe israélienne, mais celle de la « stigmatisation » de la minorité arabe par la droite nationaliste : 

« Depuis des années, la droite nationaliste israélienne se livre à une stigmatisation aux relents racistes de la minorité arabe. Les capitales occidentales ont-elles pris la mesure du venin diffusé ? Croit-on que les mots ne prospèrent que dans leur enclos, dans un pays où le premier ministre, Yitzhak Rabin, avait été assassiné par un extrémiste juif, en 1995, bien avant l’ère des réseaux sociaux ? Cette polarisation extrême se retrouve dans d’autres pays, à commencer par les États-Unis. Mais, en prospérant sur fond du conflit historique, elle est bien plus explosive en Israël. »

 

Le « suprémacisme juif », une invention lexicale du Monde… empruntée à Alain Soral

Cette thématique et la mise en accusation de la « droite israélienne » sont reprises dans un article du correspondant du Monde Ã  Jérusalem, Louis Imbert, intitulé « La violence politique a précédé celle des rues ».

 

 

Le discours politique en question n’est pas, comme un lecteur naïf aurait pu penser, celui des députés arabes ou des prédicateurs islamistes incitant à la haine d’Israël et des Juifs… Non : il s’agit du « suprémacisme juif », concept relativement nouveau que le journal Le Monde a lui-même introduit dans le champ lexical des médias français, en 2019.

L’analyse politique, discutable, du correspondant du Monde, selon laquelle « M. Nétanyahou a tenté d’associer ses alliés de la droite religieuse aux héritiers du rabbin Meir Kahane, suprémaciste juif, partisan de l’action violente, banni durant les années 1980 de la Knesset » permet ainsi d’imputer à Israël l’entière responsabilité des graves émeutes anti-juives – que les médias israéliens n’ont pas hésité à qualifier de « pogromes » – auxquelles nous avons assisté ces derniers jours.

Comme l’expliquait un analyste des médias dans une analyse parue il y a deux ans (2), « En tout état de cause, une recherche de l’expression de « suprémacisme juif » sur Google semble indiquer que son utilisation par des médias généralistes francophones est inédite. Jusqu’alors, elle était l’apanage de sites soraliens ou musulmans radicaux. C’est aussi le titre d’un ouvrage de David Duke, véritable suprémaciste blanc et ancien chef du Ku Klux Klan… Ceux qui veulent diaboliser les Juifs doivent être ravis que plusieurs grands quotidiens donnent soudain du crédit à la thèse jusqu’alors marginale de l’existence d’une tendance « suprémaciste juive ». Ils ne manqueront pas de s’en servir pour tenter de dénigrer l’ensemble des Juifs (oubliant que certains des plus virulents adversaires d’Israël, comme le Hamas ou le Hezbollah, pourraient sans doute bien davantage être qualifiés de suprémacistes, d’autant que ces courants sont beaucoup plus influents qu’Otzma Yehudit et Zehout ne le sont en Israël) ».

 

Les coupables des pogromes anti-juifs en Israël ? Ce sont les Juifs !

Ainsi, aux yeux du quotidien Le Monde, pain quotidien de l’intelligentsia française, les synagogues incendiées en Israël sont la conséquence du « suprémacisme juif ». Ce qui rappelle le propos d’un homme politique français, José Bové, qui voyait dans les incendies de synagogues françaises la « main du Mossad ». Aux yeux de M. Louis Imbert, comme à ceux de José Bové, le coupable n’est pas celui qu’on croit. Les synagogues incendiées, en Israël comme en France ? La faute aux Juifs, vous dit-on !

Dans l’édition du 16-17 mai, le titre sur cinq colonnes à la Une est « Israël intensifie sa riposte sur Gaza », titre qui laisse dans l’ombre l’intensification des tirs de missiles contre le territoire israélien.

 

 

Il s’accompagne d’un éditorial intitulé « Impuissance internationale ». La même thématique est reprise le lendemain dans Le Monde daté du 18 mai, qui titre là encore sur cinq colonnes à la Une : « Gaza sous le feu, Biden sous pression, l’UE sans voix ».

 

 

Une fois de plus, l’accent est mis exclusivement sur le feu des ripostes israéliennes contre Gaza, passant sous silence le feu des roquettes du Hamas. Quant au thème de « l’impuissance internationale », véritable serpent de mer de la doxa médiatique française au sujet du conflit israélo-arabe, il ne désigne pas du tout l’impuissance de la « communauté internationale » pour faire cesser les tirs venus de Gaza, mais son impuissance à imposer un cessez-le-feu à Israël. Car, explique l’éditorial en le déplorant, « l’Union européenne a renoncé à exercer la moindre pression sur Israël, alors que l’occupation se poursuit sans fin, que la colonisation progresse ».

Une fois de plus, Le Monde adopte sans aucune restriction le « narratif » palestinien de l’occupation, de la colonisation, avec une surenchère notable, sur laquelle une analyse plus détaillée serait utile : la « colonisation » ne concerne plus seulement, dans le vocabulaire employé par le quotidien français, les localités juives de Judée-Samarie et Jérusalem-Est. Les Juifs sont également, fait nouveau et de taille, qualifiés de « colons » à Lod, au cÅ“ur du territoire israélien. Cette escalade et cette surenchère de la rhétorique anti-israélienne du Monde méritent d’être suivies de près.

Pierre Lurçat

Avocat et écrivain, vivant à Jérusalem

 

1. Sur le phénomène de l’inversion dans le discours antisioniste en général, je renvoie à mon cours donné sur Akadem, « Les mythes de l’antisionisme contemporain », dans le cadre de l’Université populaire du judaïsme que dirige Shmuel Trigano. Ce cours fera l’objet d’un livre à paraître à la rentrée 2021.

2. Voir « Migration du discours anti-juif dans les grands médias français, un cas d’école », http://vudejerusalem.over-blog.com/2019/04/migration-du-discours-antijuif-radical-dans-les-grands-medias-francais-un-cas-d-ecole-pierre-lurcat.html

 

Vous appréciez le travail de veille et d’information d’InfoEquitable ? Aidez-nous à le poursuivre en faisant un don déductible de vos impôts Ã  hauteur de 66 % des sommes versées. Chaque geste compte ! Suivez aussi InfoEquitable sur Facebook et Twitter.


Auteur : Pierre Lurçat pour InfoEquitable. Si vous souhaitez reproduire cet article, merci de demander ici une autorisation écrite préalable.

 

Derniers commentaires
  • « L’immonde » je ne le lis plus depuis une QUINZAINE d’années… Je constate avec les extraits que vous montrez que RIEN n’a
    changé chez ces OBSEDES anti-tout ce qui concerne le monde juif…!
    Je conseille aux Français de ne plus gâcher une journée en ouvrant ce « PAPIER » qu’aurait apprécié le … GOEBBELS !
    Si cinquante mille lecteurs suivaient ma suggestion..

    Hans Waksbojm Le CONNARD du NORD

  • Comme vous je ne découvre pas l’anti sionisme voire l’antisémitisme du Monde et je ne le lis plus depuis 15 ans au moins.
    Je trouve le discours des politiques français ou leur mutisme sur le Hamas particulièrement inquiétant pour les juifs français.

Commenter

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Shares