Le journaliste Luc Chatel (à ne pas confondre avec l’ancien ministre) insiste pour minimiser la cause religieuse du terrorisme lorsqu’il est djihadiste… mais invoque un groupuscule mal connu d’il y a deux mille ans pour suggérer que c’est la religion juive qui est à l’origine du terrorisme !
A la veille de l’ouverture du procès des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher, Le Monde des religions a publié un incroyable article qui tend à exonérer l’islam de toute responsabilité majeure dans le terrorisme islamiste.
Tout l’argumentaire tourne autour de l’idée que les terroristes islamistes connaitraient mal l’islam. D’ailleurs, il ne faut pas les appeler ainsi si l’on se fie à un rapport du Sénat cité dans l’article :
« L’utilisation, pour qualifier un certain type de terrorisme, du terme “islamique” ou “islamiste”, pose évidemment problème (…), nombre de personnes qui se livrent à de tels actes ne connaissent que très peu les principes et les traditions de l’islam. »
Les terroristes en question, d’après le texte du Monde, seraient plutôt entraînés dans leurs actions sanguinaires par un mélange de soif d’aventure et d’émulation de groupe dans lequel la religion musulmane n’aurait qu’un rôle marginal :
« …si le terroriste contemporain choisit l’islam pour passer à l’acte, c’est rarement pour des raisons qui relèvent de la foi, de la conversion personnelle. Des facteurs d’ordre plus sociologique, politique et pragmatique interviennent, qui font de cette religion un terrain de choix. »
Bien sûr que des phénomènes sociaux peuvent influencer des personnes et les entraîner à tomber dans la violence, y compris parfois sous sa forme djihadiste.
Mais l’article, qui s’en tient à des supputations sur les facteurs qui minimisent l’influence de la religion, se refuse à se demander ce que contiennent les sources islamiques dont se réclament spécifiquement les partisans du djihad.
C’est un bon moyen d’éviter d’aboutir à une conclusion non souhaitée…
Terrorisme et religion
Le journaliste du Monde des religions, dont on peut supposer qu’il a de réelles connaissances en matière de religions puisqu’il a été par le passé rédacteur en chef de l’hebdomadaire Témoignage chrétien, ne s’arrête cependant pas là. Si pour lui la religion musulmane n’est pas la cause principale des attentats djihadistes, l’invention du terrorisme est attribuée… aux Juifs – et à leur religion !
C’est dit dès l’ouverture du texte :
Depuis les sicaires et les zélotes juifs1, considérés comme les premiers terroristes de l’histoire, jusqu’à Daech et Al-Qaida, la religion a toujours entretenu des liens étroits avec le terrorisme.
La référence n’est pas choisie au hasard : en plus d’être présentée dans la phrase introductive, la plus en vue de l’article, elle est accompagnée d’une note fournie qui présente les Sicaires et les Zélotes, ces deux groupes juifs sans doute obscurs aux yeux de nombreux lecteurs :
1 Les sicaires et les zélotes sont deux groupes juifs, un temps alliés, qui organisèrent une révolte armée contre l’occupant romain en Judée au Ier siècle, sur la base de lectures religieuses fondamentalistes, avec des méthodes que l’on retrouvera plus tard au sein d’autres mouvements terroristes (attentats, prises d’otage).
Message : le terrorisme sur la base de lectures religieuses fondamentalistes est une invention des Juifs, et les islamistes qui le pratiquent aujourd’hui ont beau être musulmans, ils ne sont finalement que des émules des Juifs…
Qui étaient les Sicaires et les Zélotes ?
Il faut d’abord savoir qu’ils sont mal connus. Beaucoup de ce que l’on sait sur eux provient d’une unique source, l’œuvre de Flavius Josèphe.
Or cette source n’offre pas forcément un point de vue impartial sur le sujet, puisque les Zélotes étaient un mouvement juif qui s’est révolté contre la domination de la Judée par l’Empire romain alors que Flavius Josèphe, lui, était un Juif qui avait fait le choix de devenir citoyen romain. Il était donc opposé aux Zélotes.
Les Sicaires, à propos desquels il y a un débat pour savoir s’ils étaient des Zélotes ou plutôt une émanation de ce groupe, se situaient en tout cas dans le même courant.
Il est exact qu’ils sont souvent mentionnés comme les « premiers terroristes » de l’histoire. A l’aide de leur sica (poignard), les Sicaires semaient effectivement la terreur parmi les civils.
Filiation abusive
Mais comparer les Zélotes et les Sicaires avec Daech et Al-Qaida et tracer une filiation entre les deux paraît abusif.
D’après ce que l’on sait, ces antiques terroristes s’attaquaient presque exclusivement à d’autres Juifs, souvent des notables qu’ils jugeaient trop accommodants avec les Romains.
Bien sûr, ils se réclamaient de la religion. Mais dans leur cas, justement, la principale motivation idéologique semble avoir été nationaliste davantage que religieuse.
Avec ces méthodes réprouvables d’assassinats ciblés, les Sicaires menaient en effet une lutte de libération nationale contre un envahisseur, les Romains.
Leur mouvement était ainsi lié à la situation géopolitique du moment : quand l’époque a changé, on n’a plus entendu parlé d’eux. Ils sont passés aux oubliettes de l’histoire et ils n’ont donc pas établi de précédent en engendrant des générations de « terroristes juifs ».
Il est bien évident que les islamistes qui commettent des tueries de masse (Bataclan, Nice, 11 septembre…) ne cherchent pas à libérer le territoire d’une puissance occupante. C’est même plutôt le contraire, et leurs cibles sont parmi la population qu’ils cherchent à soumettre plutôt que parmi leur propre élite.
Fausse équivalence
Quand il assure, dans sa phrase introductives liant Zélotes, Daech et Al-Qaida, que « la religion a toujours entretenu des liens étroits avec le terrorisme », le journaliste noie le poisson pour laisser entendre que, quand bien même l’islam serait un facteur important dans le terrorisme actuel, il s’inscrirait dans la suite des autres religions.
Le fameux « toutes les religions se valent ».
Or une chose est sûre : il n’y a pas de phénomène massif de terrorisme juif aujourd’hui.
Refuser de regarder en face les motivations idéologiques du terrorisme islamiste est un regrettable travers.
Mais faire porter le chapeau aux Juifs rendus responsables de l’origine de ce fléau, au moment même où s’ouvre le procès d’un attentat lors duquel quatre Juifs en ont été les victimes délibérément choisies, est plus que cela.
Car si le procès de l’attentat de l’Hyper Cacher apportera peut-être des réponses sur les motivations de l’assassin, c’est dans Le Monde que l’on aura appris que les victimes juives de Vincennes ont en quelque sorte succombé à une « invention juive ».
Un summum de cynisme.
Vous appréciez le travail de veille et d’information d’InfoEquitable ? Aidez-nous à le poursuivre en faisant un don déductible de vos impôts à hauteur de 66 % des sommes versées. Chaque geste compte ! Suivez aussi InfoEquitable sur Facebook et Twitter.
Auteur : InfoEquitable. Si vous souhaitez reproduire cet article, merci de demander ici une autorisation écrite préalable.
Image : CC Wikimedia Commons JJ Georges
htordj62 / 1 octobre 2020
Bien que les faits sur les Sicaires et Zélotes mentionnés soit exacts,
il existe depuis dans le monde juif une certaine sidération de la résistance des zélotes à Massada
face aux Romains mais qui n’a jamais été encensée par les autorités juives pour 2 raisons :
– Le suicide et le meurtre sont interdit par la religion juive, or à Massada les zélotes ont finis par s’entre-tuer avant de se suicider pour échapper aux Romains, ce qui est un dilemme certes mais pas autorisé pour autant, d’ailleurs durant la Shoah les juifs ont fait la démonstration que cette voie n’étaient pas la leur, ce qui prouve effectivement qu’ils étaient plus nationalistes que religieux ! D’ailleurs aucune fête juive ne mentionne cet événement, ils ne sont donc pas reconnu religieusement, alors que la fête de Hanoucca mentionne elle en revanche un événement aussi de résistance contre les Grecs.
– Deuxièmement pour beaucoup de juifs dont Flavius Joseph, les Zélotes et les Sicaires sont considérés comme ayant entraîné la destruction du Second Temple alors que les Romains en avait autorisé la reconstruction par Hérode le Grand,
qui elle est considérée comme une véritable catastrophe par tous les juifs et a été retenue comme le plus grand jour de Deuil dans le calendrier Juif ( le 9 av).
Donc effectivement il y a eu des juifs extrémistes il y a 2000 ans mais ils n’ont jamais eu vocation d’exemplarité pour les juifs, loin s’en faut, vu qu’ils sont responsables du début de l’exode des juifs de leur terre d’origine.
On ne peut pas donc mettre au crédit des juifs la soit disant invention du terrorisme, bien des peuples avant cela ont eu des pratiques des plus barbares, il n’y avait malheureusement plus grand chose à inventer déjà à cette époque …
L’auteur de l’article du Monde s’est servi un monceau d’histoire d’il y a 2000 ans ignoré de tous les terroristes islamistes en herbe pour tracer dans une perspective perverse dont le but est des plus suspecte, l’excuse d’une antériorité ignorée ne peut donc s’appliquer à eux !
/
Jakubowicz / 1 octobre 2020
Cet antisémitisme rampant est le pire, car il veut faire croire, en invoquant des faits qui ont plus de deux mille ans, à une similitude avec des faits actuels en faisant porter ainsi, la responsabilité aux Juifs du terrorisme islamique.
/
Nick-y / 1 octobre 2020
L’antisémitisme n’a rien de rampant excusez-moi, mais il vole et il vole bas : si on disait à ce M. Chatel que ses ancêtres (les gaulois ?) son ignorance lui vient d’eux !!!!
BEURK
/
Harry / 1 octobre 2020
Notre MONDE est immense, complexe et divers alors que le journal du même nom « Le Monde » est si petit, si étriqué et si menteur que pour grappiller quelques lecteurs antisémites de plus, Luc CHATEL son maître à penser n’hésite pas à utiliser des subterfuges décalés de 2000 ans pour expliquer l’actualité.
Il ne fait finalement que confirmer son mental corrompu du niveau de ceux qu’il cherche à déresponsabiliser.
Honte à vous Luc CHATEL.
/