Un mois après l’attentat contre des policiers au cœur de la Préfecture de Paris, une semaine avant le sombre anniversaire des attentats du 13 novembre 2015, on projette dans une salle de cinéma d’art et essai, les 3 Luxembourg, un film à la gloire de l’antisionisme génocidaire.
Quel rapport ? Les insurgés mobilisés au début de notre siècle par le discours d’antisionisme haineux, ces enragés qui marchaient, en 2014, au cri de « Mort aux Juifs », ont trouvé de nouvelles cibles : la police, l’école, l’hôpital, les pompiers, les médias, les Français… Ce n’est pas un hasard. La haine du Juif n’est que la première étape d’une longue marche contre l’ordre civil. Contre la civilisation.
Nous y sommes. Que vient faire ce film vintage, concocté de bric et de broc, qui se dit documentaire ? En guise « d’experts internationaux, historiens, diplomates des Nations unies, juristes en Droit international » on nous donne des has-beens : Alain Gresh, Dominique Vidal, Denis Sieffert, Elias Sanbar, Leila Shahid, Jean Ziegler, Richard Falk. Des never-beens : Michel Warschawski, Pierre Stambul, Sarah Katz. Et des pots de fleurs : la veuve Hessel en compagnie d’un jeune Palestinien potelé, un urbaniste de Jérusalem, quelques « élus » palestiniens et un Indien cheyenne. Sans oublier un Sud-Africain, militant du BDS, bon pour étayer l’accusation d’apartheid.
« Crimes de guerre, occupation, emprisonnement d’enfants, droits de la défense bafoués, violation du droit international, apartheid, nettoyage ethnique, nazification, colonisation, persécution et péché originel », l’Etat d’Israël est une entreprise criminelle plaquée sur la terre de Palestine par des Européens cherchant à soulager la culpabilité de l’extermination de 6 millions de Juifs et du même coup à se débarrasser des survivants, encore trop juifs à leur goût. Il ne manque pas un seul des poncifs versés sur Israël et les Juifs depuis l’an 2000, quand le blood libel al Dura a déclenché une explosion de violence antisémite de par le monde. A l’époque où des shahids (les mal nommés kamikazes) exterminaient artisanalement des civils israéliens, nos « experts internationaux » versaient goulument leur haine d’Israël. Ils justifiaient les pires atrocités alors que les corps déchiquetés gisaient dans des flaques de sang et aujourd’hui encore, vieillis mais point assagis, ils nous servent des restes réchauffés.
Bouches tordues, discours idem
S’il faut accorder un seul mérite à Roland Nurier, c’est d’avoir montré, par maladresse, le visage grotesque de la haine. Ses experts, ses spécialistes, ses détenteurs de la vérité sont tellement mal filmés — lumière crue, angle de prise de vue bancal, cadrage désobligeant, montage bâclé — qu’on pourrait s’en servir comme illustration de la malveillance. La bouche tordue, la bave au coin des lèvres, les yeux noirs, la poitrine gonflée et la peau elle-même enflammée, tout cela n’est pas visible sur les pages du Monde diplomatique, de Politis et consorts. On dirait que la caméra, plutôt char qu’olivier, leur inspire plus de franchise que la parole écrite et un tant soit peu policée. Ils s’adonnent à un vomissement jubilatoire de fantasmes géopolitiques. Il faudrait six jours plus le shabbat pour démarrer le fact check de leur discours bourré de fake news. Il y a un ver dans chaque mot, un virage malhonnête dans chaque tournure, un besoin urgent de fabriquer des réalités qui égorgent, tout en maintenant une posture ridicule de celui qui vous dit la vérité qu’on vous cache parce que, vous le savez bien, ils contrôlent les médias (BHL), les pouvoirs publics domestiques (CRIF) et internationaux (AIPAC), les universités et, attention, ils vous traquent sur les réseaux sociaux, vous insultent, vous menacent, vous accusent d’antisémitisme !!! Nous sommes les seuls qui osons le confronter, ce lobby juif tentaculaire.
J’ai pris conscience ces dernières années qu’il y a chez certains journalistes en activité « une espèce d’auto-censure » à parler ouvertement de la situation en Palestine occupée, une difficulté à nommer les choses quand on parle de la politique israélienne quand ce n’est pas tout simplement des témoignages biaisés et/ou fortement orientés vers une « vision très pro-israélienne » de la situation.
Roland Nurier
L’accusation du parti pris pro-israélien des médias français, qui en fera rire plus d’un, monte au rang de la haute comédie avec cette plainte amère : « On ne voit jamais Pierre Stambul sur les plateaux de télévision. »
Roland Nurier, illustre inconnu
Cinématographiquement parlant, Le Char et l’olivier est d’une médiocrité affligeante. Une louche de talking heads [têtes qui causent], une gamelle d’images d’archives, en alternance et ainsi de suite. Roland Nurier selon ses dires a séjourné en « Palestine » pendant quelques semaines à deux reprises, en 2014 et 2017. Cela ne se voit pas. Les prises de vue sur le terrain se limitent à des images mille fois utilisées pour attester la cruauté gratuite du soldat israélien et l’inaptitude de son armée de l’air qui, faute de pouvoir viser une cible précise, bombarde aveuglement des immeubles d’habitation, écrasant 50 familles d’un coup. On voit à maintes reprises les ruines du QG de Hamas détruit en 2014. Un coin de Hébron salopé de fils barbelés revient en litanie d’un bout à l’autre du film — c’est cela la Cisjordanie. Le volet « histoire », également salopé, mais on y reviendra, est représenté par des illustrations malhabiles, primaires, caricaturales. Ni fait ni à faire. La bande son, un mix agaçant de musique criarde et de bruits d’éclats indéfinis, est aussi monotone que l’image.
Monsieur Nurier, tempes grisonnantes, CV vide, sans le moindre petit film à son actif, trouve la gloire avec un pastiche tout juste bon à visionner dans les colonies de scouts BDS. Fier d’annoncer dans un entretien amical sur Mediapart (qui a contribué au financement du projet) qu’il accompagnera son film sur plus de 100 dates à travers la France de novembre 2019 à février 2020, Nurier avoue, lors de l’avant-première aux 3 Luxembourg, qu’il a du mal à organiser des projections dans les lycées publics. L’assistance, à quelques rares exceptions près acquise à la cause, l’encourage à persévérer.
Israël tout puissant crie au loup
Revenons enfin à l’autre histoire de la Palestine, racontée par des spécialistes dont « les travaux ne souffrent de mon point de vue d’aucun esprit partisan, et je précise au passage qu’ils sont pour la plupart ‘juifs’ ». [entretien Mediapart] Adorables, ces guillemets !
Terre sainte ? Plutôt diabolique aux mains des Juifs (sans guillemets). Rajoutons à leurs crimes multiples et impardonnables, l’anachronisme. Se faisant croire victimes d’innombrables tentatives d’annihilation, ces Israéliens sont capables de manipuler aussi bien l’opinion publique que le temps et l’espace. Goliath contre le David des armées arabes/musulmanes réunies, ils font la guerre en se faisant exprès attaquer, se disent faibles pour mieux gagner, et avalent de grosses bouchées de la Palestine à chaque coup. 1948, 1967, 1973… de là à s’imaginer qu’ils avaient manigancé la Shoah, ce n’est qu’un pas que le gentilhomme Nurier te laisse franchir sans lui.
Aussi, à deux pas de chez eux, les Israéliens (on ne dit pas « Juifs » mais c’est une évidence) créent et inventent des ennemis. Le Hamas, par exemple, là où les spécialistes du Char et de l’olivier ne voient que des résistants assoiffés de liberté. Pour seule réponse, la soldatesque. Des brutes capitonnés qui brutalisent, cassent des têtes, bousculent, tabassent, mettent les menottes et embastillent les pauvres combattants de la liberté quand ils ne « tirent [pas] sur eux comme des lapins ». Le comble, des snipers robotisés qui abattent des Palestiniens innocents du haut des « tours tueuses » maniées à distance par des soldats installés devant un écran à Tel Aviv.
Les immeubles sont bombardés à Gaza (rebelote les ruines du QG de Hamas) et démolis dans les territoires. Le plus souvent il s’agit de maisons de « martyrs ». Des martyrs, vous comprenez, comme les chrétiens persécutés par les Romains. Des martyrs, on vous explique, qui ont critiqué la politique israélienne ou peut-être lancé un caillou sur un soldat. Des martyrs, on ne vous le dit pas, des shahids qui se sont fait exploser pour tuer le plus de Juifs possible. Des martyrs abattus après avoir égorgé des Juifs. Des martyrs qu’on zigouille comme des chiens après leur courageux attentat à la voiture bélier. Alors que les Juifs ainsi assassinés dorment en paix, on démolit la maison familiale du martyr.
Les réfugiés, eux, gardent précieusement la clef de leur maison en attendant que le Droit international leur donne enfin le retour auquel ils ont droit. Il n’y a pas de clefs pour tout le monde parce que, de l’aveu même du cinéaste justicier, ils sont passés de 800.000 au départ à plus de 5 millions à frapper aujourd’hui aux portes de l’Etat juif. On se fiche de la définition mesquine du réfugié selon le Droit international qui réduira ce contingent à quelques 30.000 âmes vénérables dressées plutôt aux portes de l’éternité que de l’Etat d’Israël. Comme on fait fi de se conformer parfaitement à la définition IRHA de l’antisémitisme antisioniste. La résistance ne sera pas vaincue par des légalismes de ce genre. Il y a urgence à agir !
A quoi cela sert-il de déterrer ce vieux discours qui ne fait plus recette ? Avait-on besoin d’encore un de ces films de propagande déguisés en documentaire ? Il y en a de bien meilleurs tournés par de vrais cinéastes dans la foulée de la « deuxième intifada ».
Le BDS de la résistance
Ils ont tout essayé : les Nations unies, la diplomatie, les négociations, la grève, les roquettes et un tantinet de violence [les shahids], regrettable certes, mais les oppresseurs traitent toujours les résistants de terroristes, rien ne fait bouger la brute d’Occupation. Il faut réveiller un monde devenu sourd à la souffrance palestinienne. La solution à deux Etats a vieilli. Va pour l’État binational, retour des réfugiés et droits civiques pour tous.
Comment y arriver ? Le BDS, mon frère, le BDS international. N’ayant que le Droit et la Justice à la bouche, le Char et l’olivier se résume à un plaidoyer pour le BDS, boycott illégal en France, autrement plus costaud et point interdit aux Etats-Unis, d’où notre Indien, qui récite un poème dans sa langue natale et qui, depuis sa lointaine contrée, épouse la cause palestinienne. Belle convergence des luttes, manigancée par qui ? Linda Sarsour pardi ! Linda Sarsour, antisioniste notoire, copine du CAIR-ami-du-Hamas, virée du mouvement « la marche des femmes » pour excès d’antisémitisme explicite… Et notre gentil Lyonnais (plus exactement Tartrien) qui a troqué le béret pour le keffieh, nous fait croire que c’est lui qui a eu l’idée géniale de tendre la main à l’Amérindien, semblable au Palestinien natif de son pays avant l’arrivée des colons.
Le Char et l’olivier commence avec les élucubrations des talking heads et se termine avec un générique qui suinte l’innocence : des photos d’enfance pour identifier les membres de l’équipe. Comme c’est mignon.
Aussi, en toute innocence, ce plaidoyer pour le BDS est financé en partie par des associations dont certaines sont, elles-mêmes, subventionnées par des fonds publics — le MRAP, La Cimade, Orient 2, l’Association France Palestine Solidarité, l’Union Juive Française pour la Paix, la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, le Mouvement pour la Paix ; et des organes de presse — L’Humanité, Mediapart, Politis, Basta.
Juifs réfugiés du monde islamisé, connaît pas
Pour le prix d’entrée à l’avant-première, le spectateur a reçu gratuitement une brochure de 6 pages en quadrichromie sur papier glacé, bourrée d’informations truquées sur le conflit. Alors que la Shoah est citée à plusieurs reprises pour dire qu’on n’est pas indifférent à la souffrance des Juifs mais ce n’est pas une raison de faire souffrir les Palestiniens, il n’y pas un seul mot sur les Juifs expulsés ou forcés de fuir les pays arabo-musulmans dont ils étaient autochtones. L’existence de ces Juifs du Maghreb et du Mashrek, qui composent plus de la moitié de la population d’Israël aujourd’hui, est rayée de l’histoire, tout comme le BDS voudrait rayer l’État juif de la carte. On pourrait montrer, preuves à l’appui, que les habitants d’immeubles où le Hamas mélange savamment civils et militaires, sont avertis et invités à s’éloigner avant le bombardement. Quant aux familles écrasées par centaines sous des tapis de bombes, regardons l’élimination, le 12 novembre, de Baha Abu al-Ata, un chef du Jihad islamique : le missile a touché sa chambre à coucher en laissant le reste de l’immeuble intact. De quel droit, demanderait le film de Nurier ? La réponse est simple : du droit de ne plus être victime des génocidaires. En représailles, plus de 450 missiles ont été tirés à partir de la « prison de Gaza » contre des civils israéliens.
Même s’il serait utile de corriger les erreurs, approximations, analyses partiales et partielles figurant dans la brochure et dans le film, une autre histoire de cette « autre histoire de la Palestine » ne touchera pas le même public. Le Char et l’olivier n’est ni documentaire ni histoire ni cinéma ni sincère. C’est une banderole BDS étirée sur 1h41, ennuyeuse à mourir… pour ceux qui ne jouissent pas d’entendre dire du mal d’Israël.
Les esprits sains, par contre, chercheront à savoir pourquoi cette réclame pour le BDS International est à l’affiche dans 56 salles en France. Pourquoi ce junk film d’incitation à la haine du Juif a reçu le visa d’exploitation. Qui a choisi le parfait inconnu Roland Nurier pour relayer ce message, cette calomnie ?
Si les responsables de la programmation du Char et l’olivier s’intéressent à « l’autre histoire de la Palestine » ils trouveront de vrais documentaires sur le site du Middle East Studio, dont Terror, Racketing and Corruption, Pay for Slay, Palestinian Apartheid…
Le CHAR et l’OLIVIER / UNE AUTRE HISTOIRE DE LA PALESTINE / un documentaire de Roland Nurier / Hérisson Rebelle Production / Destiny Films Distribution / Visa d’exploitation N° 150-567
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Auteur : © Nidra Poller pour InfoEquitable. Si vous souhaitez reproduire cet article, merci de demander ici une autorisation écrite préalable.